Fiche technique: Le préambule de la Constitution de 1946
triplette 38 :: disciplines :: Institutions politiques :: semaine 2: le fonds commun, séparation des pouvoirs et droits fondamentaux
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Fiche technique: Le préambule de la Constitution de 1946
Au lendemain de le Seconde Guerre Mondiale, la France a besoin de se reconstruire moralement et institutionnellement. Après près de deux ans de « Gouvernement Provisoire », le référendum du 21 octobre 1945 montre que les Français approuvent le projet d'une nouvelle Constitution, ce qui conduit donc à la fin de la IIIème République.
Un préambule est un document qui énonce, au début d'une Constitution, les droits et les libertés des citoyens1. Le préambule de 1946 se distingue des autres car c'est un texte de référence en matière de libertés et sert encore aujourd'hui de modèle à notre Constitution actuelle.
I) Le contexte historique :
En ce qui concerne la reconstruction des institutions françaises après la guerre, le gouvernement provisoire dirigé par le général De Gaulle agit de manière démocratique. Le 21 octobre 1945, un référendum demande au peuple français s'il est nécessaire de rédiger une nouvelle Constitution, et donc de mettre fin à la III ème République ; celui-ci y est favorable. Après un premier projet de Constitution rejeté en mai 1946, la Constitution est approuvée – de justesse – le 13 octobre, puis promulguée le 27 octobre.
Cependant, pour comprendre l'enjeu que représente le préambule de la Constitution de 1946, il est essentiel de garder en mémoire le contexte historique particulier qui est celui de l'après-guerre : la France sort d'une guerre meurtrière marquée par le nazisme pendant laquelle des Droits de l'Homme ont été bafoués, et pendant laquelle le genre humain a perdu toute sa dignité. Elle doit se reconstruire dans tous les domaines, et apprendre des erreurs que les gouvernements précédents avaient pu commettre. C'est précisément ce contexte qui inspire le préambule de la Constitution de 1946.
II) Le contenu du préambule :
Selon Robert Pelloux un préambule a non seulement une signification politique mais aussi une signification symbolique : il révèle les préoccupations des constituants. Celui de 1946 est un bon exemple pour illustrer son propos : il commence par un rappel de la fin de la guerre. La reconstruction morale et politique de la France est l'enjeu principal de ce préambule et donc de la IV ème République.
L'alinéa 1 réaffirme les droits de l'Homme, sans distinction « de race, de religion ni de croyance », et fait ainsi appel à la Déclaration de 1789. L'homme a retrouvé ses droits après une longue période sombre et on peut voir ce préambule comme le prolongement concret de la Déclaration. Lionel Jospin affirme qu'avec le texte de 1946, « c'est l'homme vivant, l'homme concret qui affirme ses droits inaliénables ».
C'est aussi dans ce premier alinéa qu'apparaît l'expression des « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ». Ces principes ne sont concrétisés par le Conseil Constitutionnel qu'en 1971 et parmi eux figurent la liberté d'association, d'enseignement et de conscience. Avant qu'ils ne soient énoncés clairement, ils symbolisent la volonté des constituants de restaurer une éthique en France et de faire appel à la « tradition républicaine ».
L'égalité est la valeur qui motive la plupart des propositions de droits sociaux du préambule. Certaines mesures concernent des catégories de personnes, d'autres les travailleurs.
● Les droits des femmes sont énoncés en premier à l'alinéa 3 où on leur garantit « des droits égaux à ceux des hommes ».
● La France se présente comme un État providence à plusieurs reprises, notamment aux alinéas 10 et 11 qui sont destinés « à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs » et qui assurent protection sociale et solidarité collective. L'emploi du mot « nation » dans ces propos renforce la notion de solidarité entre les français.
● L'instruction occupe une place de choix dans ce préambule, tout comme la formation professionnelle et la culture : « L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'État » (alinéa 13).
● Plusieurs alinéas concernent les droits des travailleurs, comme le droit de grève, le droit d'être syndiqué...
● La France limite sa souveraineté dans deux alinéas : elle se soumet aux règles du droit public international, et « consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l'organisation et à la défense de la paix », c'est-à-dire que la France fait également partie d'un ensemble plus vaste dans lequel elle ne détient pas la souveraineté (l'ONU par exemple).
Les propos du préambule peuvent sembler abstraits, mais nous poussent à réfléchir à propos des finalités de l'action publique. Le gouvernement doit agir dans le but de parvenir à la réalisation des principes énoncés dans ce texte. Chaque propos économique ou social vise à améliorer les conditions de vie humaines. Selon Jacques Ribs, « l'homme était la mesure de toute chose et la finalité de tout propos économique ».
L'organisation de la société doit réaliser les principes fondamentaux du préambule. Ces principes sont généraux. S'ils sont imprécis, c'est parce qu'ils ne doivent servir qu'à guider les législateurs, et non à leur offrir une finalité.
III) La portée du préambule :
● Le préambule et la Constitution de 1958
On peut critiquer la IV ème République pour son instabilité politique. De Gaulle l'a d'ailleurs fait lors de son discours de Bayeux le 16 juin 1946. Il n'en reste pas moins qu'elle a permis au peuple français de se reconstruire moralement. Une des préoccupations et des aspirations de ce préambule a donc été menée à bien. Si la Constitution de 1946 a été remplacée par celle de 1958 qui marque le début de la Vème République, le préambule de 1946 est resté intact : on ne peut pas considérer qu'il appartient à une période politique passée puisqu'il sert en quelque sorte d'annexe au préambule de 1958. On peut y lire :
« Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu'aux droits et devoirs définis dans la Charte de l'environnement de 2004. »
Le préambule de notre Constitution actuelle est donc toujours complété par les Droits de l'Homme de 1789, mais également par le préambule de la Constitution de 1946. La Constitution de 1946 en elle-même est certes dépassée, et la IV ème République appartient à une période révolue. Toutefois, le préambule de 1946 est toujours d'actualité et fait officiellement partie de la Constitution depuis 1971.
● Le préambule prolongé par plusieurs lois
Par ailleurs, le Conseil Constitutionnel se base sur le préambule de 1946 lors de sa décision du 27 juillet 1994 en ce qui concerne la bioéthique : il s'appuie sur le droit à la « dignité de la personne humaine ». Les droits des femmes énoncés dans l'alinéa 3 ont été complétés quelques années plus tard par la loi Neuwirth en 1972 et la loi Veil en 1975, qui contribuent à l'égalité entre hommes et femmes. Quant aux droits des travailleurs énoncés dans le préambule, ils furent complétés à plusieurs reprises notamment lors des lois Auroux de 1982.
Un préambule est un document qui énonce, au début d'une Constitution, les droits et les libertés des citoyens1. Le préambule de 1946 se distingue des autres car c'est un texte de référence en matière de libertés et sert encore aujourd'hui de modèle à notre Constitution actuelle.
I) Le contexte historique :
En ce qui concerne la reconstruction des institutions françaises après la guerre, le gouvernement provisoire dirigé par le général De Gaulle agit de manière démocratique. Le 21 octobre 1945, un référendum demande au peuple français s'il est nécessaire de rédiger une nouvelle Constitution, et donc de mettre fin à la III ème République ; celui-ci y est favorable. Après un premier projet de Constitution rejeté en mai 1946, la Constitution est approuvée – de justesse – le 13 octobre, puis promulguée le 27 octobre.
Cependant, pour comprendre l'enjeu que représente le préambule de la Constitution de 1946, il est essentiel de garder en mémoire le contexte historique particulier qui est celui de l'après-guerre : la France sort d'une guerre meurtrière marquée par le nazisme pendant laquelle des Droits de l'Homme ont été bafoués, et pendant laquelle le genre humain a perdu toute sa dignité. Elle doit se reconstruire dans tous les domaines, et apprendre des erreurs que les gouvernements précédents avaient pu commettre. C'est précisément ce contexte qui inspire le préambule de la Constitution de 1946.
II) Le contenu du préambule :
Selon Robert Pelloux un préambule a non seulement une signification politique mais aussi une signification symbolique : il révèle les préoccupations des constituants. Celui de 1946 est un bon exemple pour illustrer son propos : il commence par un rappel de la fin de la guerre. La reconstruction morale et politique de la France est l'enjeu principal de ce préambule et donc de la IV ème République.
L'alinéa 1 réaffirme les droits de l'Homme, sans distinction « de race, de religion ni de croyance », et fait ainsi appel à la Déclaration de 1789. L'homme a retrouvé ses droits après une longue période sombre et on peut voir ce préambule comme le prolongement concret de la Déclaration. Lionel Jospin affirme qu'avec le texte de 1946, « c'est l'homme vivant, l'homme concret qui affirme ses droits inaliénables ».
C'est aussi dans ce premier alinéa qu'apparaît l'expression des « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ». Ces principes ne sont concrétisés par le Conseil Constitutionnel qu'en 1971 et parmi eux figurent la liberté d'association, d'enseignement et de conscience. Avant qu'ils ne soient énoncés clairement, ils symbolisent la volonté des constituants de restaurer une éthique en France et de faire appel à la « tradition républicaine ».
L'égalité est la valeur qui motive la plupart des propositions de droits sociaux du préambule. Certaines mesures concernent des catégories de personnes, d'autres les travailleurs.
● Les droits des femmes sont énoncés en premier à l'alinéa 3 où on leur garantit « des droits égaux à ceux des hommes ».
● La France se présente comme un État providence à plusieurs reprises, notamment aux alinéas 10 et 11 qui sont destinés « à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs » et qui assurent protection sociale et solidarité collective. L'emploi du mot « nation » dans ces propos renforce la notion de solidarité entre les français.
● L'instruction occupe une place de choix dans ce préambule, tout comme la formation professionnelle et la culture : « L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'État » (alinéa 13).
● Plusieurs alinéas concernent les droits des travailleurs, comme le droit de grève, le droit d'être syndiqué...
● La France limite sa souveraineté dans deux alinéas : elle se soumet aux règles du droit public international, et « consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l'organisation et à la défense de la paix », c'est-à-dire que la France fait également partie d'un ensemble plus vaste dans lequel elle ne détient pas la souveraineté (l'ONU par exemple).
Les propos du préambule peuvent sembler abstraits, mais nous poussent à réfléchir à propos des finalités de l'action publique. Le gouvernement doit agir dans le but de parvenir à la réalisation des principes énoncés dans ce texte. Chaque propos économique ou social vise à améliorer les conditions de vie humaines. Selon Jacques Ribs, « l'homme était la mesure de toute chose et la finalité de tout propos économique ».
L'organisation de la société doit réaliser les principes fondamentaux du préambule. Ces principes sont généraux. S'ils sont imprécis, c'est parce qu'ils ne doivent servir qu'à guider les législateurs, et non à leur offrir une finalité.
III) La portée du préambule :
● Le préambule et la Constitution de 1958
On peut critiquer la IV ème République pour son instabilité politique. De Gaulle l'a d'ailleurs fait lors de son discours de Bayeux le 16 juin 1946. Il n'en reste pas moins qu'elle a permis au peuple français de se reconstruire moralement. Une des préoccupations et des aspirations de ce préambule a donc été menée à bien. Si la Constitution de 1946 a été remplacée par celle de 1958 qui marque le début de la Vème République, le préambule de 1946 est resté intact : on ne peut pas considérer qu'il appartient à une période politique passée puisqu'il sert en quelque sorte d'annexe au préambule de 1958. On peut y lire :
« Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu'aux droits et devoirs définis dans la Charte de l'environnement de 2004. »
Le préambule de notre Constitution actuelle est donc toujours complété par les Droits de l'Homme de 1789, mais également par le préambule de la Constitution de 1946. La Constitution de 1946 en elle-même est certes dépassée, et la IV ème République appartient à une période révolue. Toutefois, le préambule de 1946 est toujours d'actualité et fait officiellement partie de la Constitution depuis 1971.
● Le préambule prolongé par plusieurs lois
Par ailleurs, le Conseil Constitutionnel se base sur le préambule de 1946 lors de sa décision du 27 juillet 1994 en ce qui concerne la bioéthique : il s'appuie sur le droit à la « dignité de la personne humaine ». Les droits des femmes énoncés dans l'alinéa 3 ont été complétés quelques années plus tard par la loi Neuwirth en 1972 et la loi Veil en 1975, qui contribuent à l'égalité entre hommes et femmes. Quant aux droits des travailleurs énoncés dans le préambule, ils furent complétés à plusieurs reprises notamment lors des lois Auroux de 1982.
EstherW- Invité
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